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CNA 2017 : l’acte d’avocat bientôt auréolé de la force exécutoire ?

Civil - Procédure civile et voies d'exécution
24/10/2017
Lors de la Convention nationale des avocats (CNA) qui s’est tenue à Bordeaux du 18 au 21 octobre derniers, l’acte d’avocat aura été au cœur des revendications de la profession, qui réclame qu’il soit revêtu de la force exécutoire. « Oui, non, peut-être », aura été la réponse en trois temps du gouvernement.
« Madame la ministre, pour parvenir pleinement et librement à cette sécurité juridique, il ne manque qu’une vertu à l’acte contresigné par avocat : sa force exécutoire », a déclaré Pascal Eydoux, président du Conseil national des barreaux (CNB), le 19 octobre 2017, face à la garde des Sceaux, Nicole Belloubet.

« Non ».−. Premier membre du gouvernement à s’adresser aux quelques 5600 avocats inscrits à la CNA, elle fera une réponse évasive, sonnant plutôt comme un refus, même si elle s’est dite « ouverte aux propositions du CNB » (voir notre article du 20/10/17 : « CNA 2017 : des avocats volontaires mais sceptiques, une garde des Sceaux évasive »). Sans opposer une fin de non-recevoir, Nicole Belloubet a affirmé que les sociétés pluri-professionnelles d'exercice (SPE) devraient permettre de régler ce problème sans toucher aux spécificités de chaque profession (i.e. notaires et avocats).

« Ni oui, ni non, peut-être ».−. Le lendemain matin, vendredi 20 octobre, c’était au tour de Thomas Andrieu, directeur des Affaires civiles et du Sceau, de s’exprimer sur le sujet, lors de la plénière consacrée au thème de « L’avocat stratège de la Justice du XXIe siècle ». « Quand le président Eydoux me demande la force exécutoire pour l’acte d’avocat, je ne dis pas oui, je ne dis pas non, je dis c’est maintenant qu’on regarde ! ». La question, à laquelle il a affirmé ne pas avoir de réponse aujourd’hui, fera partie des réflexions menées dans le cadre des chantiers de la Justice lancés le 6 octobre (voir notre article du 06/10/17 : Chantiers de la justice : les travaux démarrent !), et plus spécifiquement dans celui dédié à la réforme de la procédure civile.

D’ores et déjà, a indiqué Thomas Andrieu, des questionnaires ont été adressés au chefs de cours le 20 octobre, et au CNB le 23 octobre, qui comportent des interrogations sur ce point : « Faudra-t-il donner la force exécutoire à l’acte contresigné par avocat ? », « Si oui, à quelles conditions ? ». Car la question de la responsabilité de l’avocat sera posée dans ce cas-là, a-t-il rappelé : « Nouveau droit, nouveau régime de responsabilité, et le cas échéant, contrôle par la puissance publique ; ce qui ne va pas de soi avec le principe de l’indépendance de l’avocat ». Un principe que Pascal Eydoux rappelle d’ailleurs bien souvent (voir notamment son discours du 19/10/17 : Les avocats sont « libres et indépendants »).

À supposer que les avocats soient entendus, le changement ne sera pas pour 2018. En effet, la garde des Sceaux a annoncé le 19 octobre, lors d’un point presse qui s’est tenu à l’issue de son discours, que la réforme de la procédure civile n'aura pas lieu avant 2019, faute de véhicule législatif.

« Peut-être ».−. Le dernier mot aura été pour le Premier ministre, Édouard Philippe, lors de son intervention dans la soirée du 20 octobre, devant une assemblée avide de réponses. Les avocats en seront pour leurs frais, même si le chef du gouvernement a laissé la porte ouverte, et fait renaître l’espoir enterré la veille par sa ministre de la Justice : « Je vais instruire votre requête », a-t-il déclaré. « Nous le ferons en toute transparence bien entendu et nous le ferons aussi dans le plus grand sérieux et avec l'ensemble des éléments qui doivent être convoqués pour répondre à votre question ». Un « nous » comme pour réassocier, au dernier moment sa ministre, très effacée face à une profession dont elle a pourtant la tutelle.
Source : Actualités du droit